Le système agricole du GAEC Terras Comunas
Pour ceux qui voudraient en savoir plus, nous vous décrivons ici notre mode d’élevage. Vous y trouverez notre système de rotation, ce que font et ce que mangent nos animaux au cours des quatre saisons, etc.
Ceux qui ont parcouru notre documentation l’auront déjà compris : dans le système d’élevage que nous pratiquons, c’est la nature qui donne le rythme ! De même que nous considérons que les ruminants mangent des végétaux, et non des granulés, nous pensons que la place des animaux n’est pas confinée entre quatre murs. Aussi, nos brebis ne rentrent-elles en bergerie qu’au moment de l’agnelage, ou en cas de météo vraiment trop mauvaise.
Quels animaux élevons-nous ?
Nous élevons environ 200 brebis pures limousines, et une quinzaine de vaches de race Highlands cattle. Très bien adaptées au terrain que nous occupons, ce sont des animaux pas farouches, mais potentiellement baladeurs, et grand ravageurs de fruitiers lorsqu’ils en rencontrent ! Cependant, ces « défauts » sont, sur un terrain de lande et de tourbières comme le notre, un atout essentiel pour tirer profit de la végétation, et s’avèrent donc des qualités essentielles pour notre projet. Bêtes peu productive mais rustiques : ces « inconvénients » sont ce qui permet aux troupeaux de bien se développer dans des conditions floristiques et climatiques plutôt rudes.
Nous avons choisi de travailler à partir des contraintes qui sont celles du territoire, en les considérant comme des atouts et aussi comme le lieu où il fait bon, pour nous, vivre et travailler.
Les agneaux grandissent et sont engraissés uniquement à partir de ce qu’ils broutent sur nos parcelles : landes, tourbières et prairies. Ils sont élevés au long d’un cycle saisonnier complet (printemps, été, automne).
Les bœufs sont élevés pendant une durée de quatre années complètes ! Eux aussi ne consomment durant toute leur vie que les aliments variés qui poussent naturellement sur les parcelles variées de la ferme.
L’hiver
Début janvier, c’est la saison la plus calme. Les brebis viennent de rentrer en bergerie, pour se préparer à l’agnelage qui commencera dans trois semaines environ. Souvent, dehors, il y a de la neige. Les prairies ont gelé, et ne restent dans les landes qu’une nourriture plutôt rare et pauvre : feuilles de ronces, bruyères, genets… Encore une grande partie de ces ressources ayant été consommées au cours de l’automne et du début d’hiver !
Seuls restent à l’extérieur les animaux les plus costauds : les vaches Highlands, qui supporteraient mal l’enfermement, et les « antenaises », les agnelles de l’année dernière, qui se forgent un caractère avant leur intégration définitive dans le troupeau au printemps.
C’est la courte période pendant laquelle les animaux consomment le foin que nous avons fauché en été. Les brebis qui sont en bergerie, mais aussi les bêtes qui restent dehors, reçoivent quotidiennement une ration de fourrage, ainsi que des compléments de sels aux minéraux, et de la luzerne ou du sarrasin pour les brebis qui vont mettre bas.
A la fin du mois les premiers agneaux commencent à naître ! Cette période dite de « l’agnelage » se poursuivra jusqu’en mars. A ce moment, l’essentiel de notre activité est tourné vers l’accueil des agneaux.
Le printemps
Vers la mi-mars, l’herbe verte commence timidement à poindre. Si le temps le permet, les agneaux les plus grands, accompagnés de leurs mère, vont découvrir le monde extérieur pour la première fois ! Bien que tétant encore leurs mères, ils commenceront tout de suite à goûter l’herbe. Mais tout ce beau monde est encore complémenté en foin.
Au mois d’avril, l’herbe commence vraiment à pousser. Les antenaises rejoignent les brebis accompagnées de leurs agneaux sur les prés de fauche, qu’ils vont « déprimer » : on leur fait manger la première pousse de l’herbe.
Cela ne dure pas très longtemps : dès la fin du mois d’avril, il s’agit de laisser l’herbe des prés de fauche pousser et la réserver pour le foin, qu’on fauchera l’été venu. Les troupeaux vont rejoindre les parcours ligneux : landes à bruyères, mais aussi ronces, genets, pelouses sèches, et aussi arbustes : l’alimentation, plus variée, requiert aussi plus de tactique aux animaux pour être consommée ! Les agneaux apprennent à se former à ce nouveau sport.
L’été
Au mois de juin, il commence à faire chaud, et la laine commence à peser aux moutons ! C’est le moment de les tondre, et de séparer les brebis qui vont partir en estive (les plus en forme) de celles qui vont rester sur la ferme. Les agneaux sont de ceux-là, et sont sevrés : ils sont assez âgés pour ne plus boire de lait, et trop jeunes pour aller à l’estive ; ils attendront le retour de leur mère en restant à la ferme, avec les vieilles brebis.
Et c’est la transhumance ! les brebis d’estive rejoignent les autres troupeaux du groupement pastoral (issus d’autres fermes), avec lesquelles elle passeront l’été sur les hauteurs du Plateau, vers les sources de la Vienne et la tourbière du Longeyroux, sous la bonne garde des bergers.
Cependant, vers chez nous aussi, la molinie dans les tourbières commence à verdir. C’est le moment où, moutons ou vaches, on va pouvoir commencer à descendre dans les prés mouillés !
En même temps, de notre côté, on commence à s’organiser pour les foins. C’est aussi le moment des semis de sarrasin si on en fait.
Juillet, c’est le plein mois des foins. Toute l’énergie est tournée vers là : ce sera la nourriture pour les temps difficiles ! Heureusement, les troupeaux qui ne sont pas partis en estive, bien tranquilles dans les parcs fixes des tourbières, demandent peu d’entretien à cette période.
Les troupeaux, vaches et moutons passeront tout l’été dans la tourbière. Il y fait frais, et pendant cette courte période de deux ou trois mois, la nourriture y est abondante. C’est aussi l’endroit où il reste de l’eau, et à manger, même en cas de sécheresse !
Fin août, la molinie, en graine, commence à devenir dure et amère. Les vaches comme les brebis commencent à la dédaigner et réclament un autre milieu ! En même temps, les première gelées surviennent dans les fonds mouillés.
Il est temps pour les troupeaux de quitter les tourbières pour intégrer les landes.
L’automne
Début septembre on amène les béliers dans le troupeau, et la « lutte » commence ! Les agnelles sont séparées des brebis, elles sont trop jeunes pour rencontrer le bélier.
De leur côté, les agneaux mâles destinés à être mangés ont droit à la meilleure nourriture : à la sortie des tourbières ils intègrent les prés de fauche, sur lesquels le regain a commencé à repousser. Ils engraisseront sur le regain jusqu’à la fin de l’automne.
A la fin du mois, on récolte le sarrasin. Et c’est aussi le retour des brebis d’estive ! Après quatre mois passés sur les hauteurs sous la bonne garde du berger, le troupeau en pleine forme retourne sur la ferme où elles rejoignent les autres, et les béliers !
En octobre, novembre et décembre, c’est le moment de tuer les agneaux de boucherie qui seront mangés ou vendu cette année. Ils ont à ce moment entre 7 et 10 mois, et auront passé presque toute leur vie à l’extérieur, en semi-liberté dans des milieux riches et variés. Ils n’auront jamais consommé d’autre nourriture que celle qui pousse dans la nature, et qu’ils auront brouté à même la prairie, la tourbière ou la lande.
Une partie des agneaux mâles cependant ne seront pas tués : certains seront gardés comme béliers, et seront vendus comme reproducteurs, ou échangés contre d’autres béliers avec des éleveurs voisins. D’autre, encore trop petits à l’automne, seront gardés pour le printemps et le début de l’été suivant où ils seront destinés à la boucherie alors que les jeunes de l’année suivante seront encore trop petits : c’est ce qu’on appelle les agneaux « de report ». Ils passeront l’hiver dans les landes, complémentés en foin, et seront engraissés au printemps suivant avec la nouvelle herbe.
Voilà, c’est le retour de l’hiver. Les vaches et les lots de moutons qui restent dehors commencent à recevoir leur complément de foin ; et bientôt les brebis gestantes vont rentrer en bergerie pour se préparer à l’agnelage. Une nouvelle année va pouvoir commencer.
Ce système permet d’entretenir les landes, les tourbières, et les milieux naturels en général.
Il est adapté à la configuration du territoire : beaucoup de parcours pour peu de terres fauchables et cultivables.
Mais nous pensons que c’est aussi un système d’avenir, que nous voulons promouvoir : il nous permet d’être indépendants face aux intrants divers, et c’est celui qui est le plus respectueux de l’environnement ! Au lieu d’être destructeur de milieux naturels, il permet de préserver ceux-ci en les maintenant ouverts par le pâturage, sans les abîmer.
Quant à la faible proportion de terres qui sont cultivées ou fauchées, elle sont réservées à la production d’alimentation liée à des cas particuliers où il faut une nourriture complémentaire : coeur de l’hiver, allaitement, croissance des agneaux…
Ce système de rotation permet aussi de limiter les risques parasitaires au maximum, puisque les troupeaux ne repassent que rarement dans l’année sur une même parcelle.
C’est ce mode d’élevage qui permettra à nos puys de retrouver la couleurs des callunes en fleur à la fin de l’été, et des myrtilles sauvages dans les landes !